Le choléra d’Irlande

Par Jean-Bernard Carrier

 

 

Saviez-vous que… Grosse-Île

De 1832 à 1937 la Grosse-Île, située dans le fleuve Saint-Laurent, face à Montmagny (environ 40 km en aval de Québec) servait de station de quarantaine pour éviter que des épidémies de choléra et d’autres maladies infectieuses se déclarent au pays. En effet, tous les immigrants (qui arrivaient principalement par bateau sur le fleuve) devaient y faire une quarantaine avant de pouvoir mettre le pied en ville! C’est pourquoi on la surnomme aussi l’Île-de-la-Quarantaine.

« Malgré ces efforts, une épidémie de choléra se propage en 1833-1834 à Québec et à Montréal, faisant respectivement 3 800 et 1 900 victimes. »1 Le choléra cause des « diarrhées brutales et abondantes »2 entraînant la déshydratation et même la mort d’environ la moitié des personnes atteintes.

En 1847, une grande famine sévit en Irlande. Des milliers d’Irlandais fuyant la faim émigrent vers le Canada. Après 6 à 9 semaines de traversée de l’Atlantique 441 navires arrivent à destination du port de Québec. S’ils ne sont pas déjà morts en mer (5000), les 90 150 migrants arrivent à Grosse-Île épuisés, mal nourris et malades. Une épidémie de typhus se déclare sur l’île. Le typhus cause une grave fièvre. Cette maladie est due à des bactéries transmises par les puces transportées à bord des navires par les rats.3 On dénombre plus de 5000 morts sur l’île dont du personnel médical. L’épidémie atteindra des villes accueillant les Irlandais comme Montréal et Kingston. Au total, on estime que l’épidémie de 1847 aura fait 20 000 morts.

Je vous recommande grandement d’aller visiter le Lieu historique national de la Grosse-Île-et-le-Mémorial-des-Irlandais l’été prochain. Il faut prendre un petit bateau à partir du port de Québec ou à Berthier-sur-Mer opéré par les croisières Lachance.4 Bonne fin de semaine!

Sources :

  1. L’Encyclopédie Canadienne, Lieu historique national de la Grosse-Île-et-le-Mémorial-des-Irlandais, consulté le 25 mars 2020, https://www.thecanadianencyclopedia.ca/fr/article/grosse-ile-la .
  1. Wikipédia, Choléra, consulté le 25 mars 2020, https://fr.wikipedia.org/wiki/Chol%C3%A9ra .
  1. Wikipédia, Typhus, consulté le 25 mars 2020, https://croisiereslachance.com/

https://fr.wikipedia.org/wiki/Typhus

  1. Croisières Lachance, Nos croisières, consulté le 25 mars 2020, https://croisiereslachance.com/

La grippe espagnole

Par Jean-Bernard Carrier

 

 

Saviez-vous que… Baie-Johan-Beetz

 

En 1918, la 1re Guerre mondiale était sur le point de se terminer, mais la “grippe espagnole” (souche A(H1N1) très virulente) se propageait partout dans le monde. On la surnomme espagnole car, l’Espagne ne participait pas à la “Grande Guerre”. C’est donc le seul pays qui avait publié des informations sur la pandémie… bien que la grippe serait originaire des États-Unis. La pandémie de 1918 a fait entre 20 et 50 millions de morts (2 à 5 % de la population du monde à cette époque).

Baie-Johan-Beetz, petit village de moins de 100 habitants de la Côte-Nord, est le seul endroit qui a été épargné. En effet, Johan Beetz, médecin et biologiste d’origine belge établit dans la petite communauté, avait mis le village en quarantaine pour ainsi sauver des vies! Fait intéressant, cet homme est aussi un des fondateurs du jardin zoologique de Québec (aujourd’hui fermé)!

Sources:

Wikipedia, Grippe espagnole, consulté le 20 mars 2020, https://fr.wikipedia.org/wiki/Grippe_espagnole .

Wikipedia, Baie-Johan-Beetz, consulté le 20 mars 2020, https://fr.wikipedia.org/wiki/Baie-Johan-Beetz .

Wikipedia, Johan Beetz, consulté le 20 mars 2020, https://fr.wikipedia.org/wiki/Johan_Beetz .

La Peste noire

Par Jean-Bernard Carrier

 

Lors de la seconde moitié du Moyen Âge (476 à 1492), donc à partir de l’an 1000, on assiste à un véritable essor urbain et commercial. En effet, les bourgs fortifiés et les villes européennes que l’on connaît aujourd’hui telles que Paris, Bruges ou Florence sont en pleine expansion, car le commerce est florissant. Des navires de marchandises parcourent la mer Méditerranée et la mer du Nord alors que les anciennes routes romaines sont utilisées par les commerçants pour voyager d’une ville européenne à une autre, d’un royaume à un autre et même jusqu’au Moyen-Orient! C’est le grand commerce!

Les villes, à cette époque, se développent très rapidement grâce à l’économie , mais leur développement n’est pas planifié… Les maisons étaient collées les unes sur les autres, il n’y avait pas d’infrastructures comme des égouts ou des aqueducs (ce qui existait quelques siècles plus tôt dans l’Empire romain). Vous pouvez vous imaginer que les rues ressemblaient rapidement à des égouts et des dépotoirs à ciel ouvert. L’eau potable des puits, des fontaines ou des cours d’eau était contaminée et des incendies ravagent régulièrement des bourgs entiers. Enfin, vu la promiscuité, au 14e siècle, des épidémies de choléra ou de fièvre frappèrent l’Europe à plusieurs reprises.

C’est toutefois la Peste noire (ou Grande Peste) qui fera le plus de ravages. La peste cause une forte fièvre, une dégradation de l’état général, parfois des problèmes pulmonaires, des maux de tête, l’apparition de bubons (enflure des ganglions) et la mort.(1.) En 1348, environ le tiers de la population d’Europe succombe à cette maladie (25 millions de morts). À cette époque, on ne sait pas encore que « la peste est causée par un bacille [bactérie] transmis par les puces. Les puces vivent sur les rats qui infestent les navires. »(2.) Vu le manque d’hygiène et le manque de distanciation sociale(concept récent dans l’histoire) sur les navires et dans les villes, les humains sont infectés par les puces. Le commerce maritime étant en pleine effervescence lors de cette période de l’histoire, la maladie se propage très rapidement à travers l’Europe en suivant les routes commerciales. 

Des gravures du Moyen Âge montrent des médecins qui, pour se protéger tout en soignant les malades de la peste, portaient une grande robe noire, des gants et un masque rappelant un bec d’oiseau rempli d’épices odorantes. Ils étaient surnommés « corbeaux » et touchaient les malades avec un bâton pour ne pas se contaminer. 

Sources: 

  1. Passeport santé, La peste, consulté le 30 mars 2020, https://www.passeportsante.net/fr/Maux/Problemes/Fiche.aspx?doc=peste
  2. Line Lamarre, dir., Réalités, histoire et éducation à la citoyennenté, Manuel de l’élève 1B, ERPI, St-Laurent, 2005, p. 313. 
  3. Wikipédia, Peste bubonique, consulté le 30 mars 2020, https://fr.wikipedia.org/wiki/Peste_bubonique

Tous égaux devant le coronavirus: pas vraiment! (Partie 1)

Par Michel Bouchard

«Ce qui est vieux meurt, ce qui est nouveau lutte pour naître, et dans l’interrègne, nombreux sont les symptômes morbides.»

Antonio Gramsci,

Quaderni del carcere, 1930.

 

Il y a de ça quelques années, j’ai terminé une maîtrise en enseignement de l’histoire à l’université de Sherbrooke. Hélas, seulement trois personnes ont lu mon essai: mon professeur, Tristan Landry, le correcteur et moi-même. La thèse que j’ai développée était tirée des différents ouvrages de Joseph Stiglitz qui a été  vice-président de la Banque mondiale, conseiller économique de Bill Clinton et récipiendaire du prix Nobel de l’économie en 2000. En substance, dans cet essai, j’ai développé la thèse suivante: les échecs de la mondialisation sont attribuables au modèle néolibéral issue du consensus de Washington. (Vous pouvez cliquer le lien précédent pour lire mon essai.(Bon courage)  Selon Stiglitz, il ne faut pas remettre en question la mondialisation, elle était inévitable.  C’est la façon dont elle a été conduite qui a fait défaut. Elle a été vectrice d’inégalités disgracieuses, tant à l’échelle nationale des pays développés, qu’à l’échelle internationale. La crise du coronavirus nous offre, encore une fois, un laboratoire à ciel ouvert pour observer ces inégalités. 

P.S. J’ai écrit un article sur le sujet en 2017. Les inégalités dans la répartition des richesses.

Dans les pays développés

Les réactions à cette crise sont nombreuses dans les pays développés. Ces pays ont déployé un arsenal impressionnant pour soutenir les citoyens, pour qu’ils puissent passer à travers ce péril insidieux. La crise nous permet d’observer de grandes inégalités dans notre société. Il y a les riches et il y a les pauvres. Ceux qui passeront à travers cette crise sans trop de problèmes et qui en profiteront pour faire des choses qu’ils n’avaient jamais le temps de faire. Ceux qui peineront pour joindre les deux bouts, parce que frappés par une perte de revenus importante. Cette catégorie de personnes sortira de cette crise traumatisée, car elle devra se serrer la ceinture pendant des semaines, voir des mois et sera dépendante de  l’aide des gouvernements.

Rester à la maison est un privilège. La distanciation sociale est un privilège (titre emprunté dans l’article suivant:)

Aux États-Unis, les Noirs et les plus pauvres touchés de plein fouet par l’épidémie. https://www.courrierinternational.com/article/inegalites-aux-etats-unis-les-noirs-et-les-plus-pauvres-touches-de-plein-fouet-par-lepidemie

À l’exception de quelques pays, dont la Suède, les dirigeants ont adopté une stratégie de confinement pour lutter contre la pandémie. Toutefois, ce concept fortement encouragé par nos gouvernements est un concept qui est beaucoup plus facile à appliquer dans les foyers nantis.  Il ne faut pas oublier que des millions d’enfants, dans les pays développés, dépendent de l’aide du gouvernement pour prendre au moins un bon(ou un seul) repas par jour et qu’ils prennent ce repas à l’école. Dans ce contexte, le confinement poussera bien des gens dans l’insécurité alimentaire. En fait: l’isolement, est une affaire beaucoup plus facile à faire pour les riches, car les familles à faible revenu, vivent dans des espaces restreints, doivent emprunter le transport en commun pour se déplacer et peinent à soutenir leurs enfants dans leurs travaux scolaires, sans oublier le fossé important entre les enfants qui fréquentent les institutions publiques et les institutions privées, notamment au Québec. Au sortir de cette crise, il ne faudra pas s’étonner de voir une augmentation du décrochage et des difficultés scolaires et donc de voir une augmentation des disparités économiques à moyen terme.

La pause économique

Devant la logique de cette pause économique, il y aura des drames humains, car  les dettes contractées devront être honorées. Plusieurs institutions financières ont commencé à proposer leur aide pour soulager les citoyens. Reports de paiements d’hypothèque et de carte de crédit. Au bout de la course, les intérêts vont continuer de courir et les institutions financières ne perdront pratiquement rien. Ce sont les citoyens qui en ressortiront plus endettés. Il ne faut pas oublier, que les six plus grandes institutions financières au Canada, ont générées pour 46,6 milliards$ de profits en 2019 et qu’elles ont reçu 114 milliards$, entre 2008 et 2010, du gouvernement canadien pour passer à travers la crise de 2008.(Aux États-Unis ce sont des montants titanesques)  Elles offrent donc aux citoyens, de la fausse aide. Il s’agit plutôt de quelque chose comme une manœuvre politique pour donner l’illusion à la société qu’elles font leur part. Il ne faut pas être dupe… Au final, la perte de revenus sera dévastatrice pour les petits budgets, car il n’y aura probablement pas beaucoup de reports pour le paiement du loyer. C’est ici que s’arrête la logique de la pause économique. Il y a un loyer qui est à échéance et une épicerie à faire et mon propriétaire à une hypothèque à payer et une épicerie à faire. Qui va l’emporter selon vous?

Ma peur avec cette crise, c’est l’exacerbation des inégalités qui sera elle créatrice d’instabilité dans plusieurs grandes démocraties.  Notre société s’en trouvera complètement transformée au niveau économique et social. En 2008, le modèle néolibéral avait été lourdement écorché, mais les  interventions gouvernementales sans précédent de 2020 marqueront probablement la fin de ce modèle économique, catalyseur d’inégalités.

P.S. Dans le prochain article, je parlerai des inégalités devant la pandémie, d’un point de vue global.

Conclusions hâtives sur le Covid-19

Par Michel Bouchard

Depuis quelques années, j’écris sur l’actualité internationale. La semaine dernière, mon gouvernement a décidé de nous mettre en congé forcé. Tout ce temps à ma disposition pour écrire. Mon objectif était de ne pas écrire sur le coronavirus. J’ai d’ailleurs commencé un texte sur le prix du pétrole. Pourtant, j’ai décidé d’écrire sur ce foutu virus. À l’instar des médias et des gens, je ne suis pas capable de penser à d’autres choses. En me levant le matin, j’espère avoir fait un cauchemar, mais rapidement mon environnement technologique me rappelle que nous sommes bel et bien en guerre contre un ennemi invisible. Dans ce contexte, quel angle original pour écrire ce texte ? Tout a été dit, mais j’ai besoin d’en parler. Je vais essayer de tirer des conclusions hâtives sur ce qui nous arrive en ce moment. Faisons de la futurologie…

1. Retour sur l’importance de la famille: Vivre en quasi-confinement avec les membres de notre famille, nous amène forcément à nous rapprocher d’eux. Cette crise nous amènera peut-être à réaliser l’importance de la famille. Nous écoutons des films, nous jouons à des jeux de société, nous jouons au hockey dans la rue(pendant que nous le pouvons encore). Ces moments deviendront peut-être les meilleurs souvenirs qu’auront les enfants avec leurs parents. Une période où nous n’avons pas le choix d’être là l’un pour l’autre. Malheureusement, c’est peut-être lors de cette occasion que l’on va réaliser que nous ne sommes pas bien ensemble.

2. L’éloge de la lenteur: Avec le confinement, nous n’avons pas d’autres choix que de prendre un temps pour réfléchir. En espérant que nous gardions ce réflexe après la tempête… La vie allait vite et nous sommes en pause maintenant… Pourquoi ne pas s’en inspirer pour le futur ?

3. L’importance d’une gouvernance mondiale: La pandémie que nous traversons actuellement nous fait réaliser le manque de cohésion à l’échelle internationale. Le Covid-19 est apparu en Chine en décembre 2019. Les Chinois n’ont pas voulu paniquer trop rapidement et ont attendu au 31 décembre 2019 pour fermer les frontières de la région de Wuhan. Entre le moment où les autorités ont évoqué cette possibilité et la fermeture effective, 7 millions de personnes ont quitté la région. Imaginez le vecteur de contagion!  Ces gens ont répandu le virus partout sur la planète. Dans ce contexte, il faut remettre à l’agenda l’idée de la création d’un gouvernement mondiale qui aurait essentiellement le rôle de gérer le déploiement de la mondialisation. La pandémie est une conséquence de la mondialisation et l’organisme qui est responsable de veiller au grain est l’OMS. C’est cet organisme qui a sonné l’alarme en décrétant que le Covid-19 était devenu une pandémie le 11 mars. C’était trop peu trop tard! À partir de là, chaque pays y est allé de ses dispositions. Avec un gouvernement mondial, il pourrait y avoir une meilleur cohésion internationale sur la lutte à cet ennemi invisible. Actuellement, chacun fait ce qu’il veut et plusieurs dirigeants mettent inutilement en danger des vies. À suivre…

4. La transformation du monde du travail: Le confinement graduel proposé par le gouvernement a amené les employeurs à se questionner sur leur capacité à mettre leurs employés en télétravail. Évidemment, cette pratique n’est pas possible dans tous les domaines, mais disons qu’il y a un potentiel intéressant à ce niveau. Si nous pouvions enlever de 10 à 20% des travailleurs sur la route une à deux journées par semaine. Nous pourrions régler une partie de la problématique en matière de circulation automobile.

5. L’importance de la démocratie et de la liberté: Afin de lutter contre ce fléau, notre gouvernement a mis en place une série de mesures pour permettre une meilleure cohésion sociale. Cette cohésion n’est possible que si nos libertés individuelles sont brimées. ( Ce qui ne fait pas l’unanimité au Royaume-Uni et aux États-Unis)

6. John McCain: Il y a 27 millions d’Américains qui n’ont aucune couverture d’assurance-maladie. Les États-Unis sont sur le point de devenir le principal foyer de contagion. Les autorités sanitaires craignent le pire et je pense aussi que ça sera l’hécatombe. Lorsque Donald Trump a été élu, il avait promis de saborder le ObamaCare. L’idée c’était d’enlever la couverture médicale à 25 millions d’Américains supplémentaires. La tragédie n’aurait été que plus importante. Heureusement, l’Administration Trump n’a pas été capable de mener à bien son projet. N’eut été de la détermination et l’entêtement de John McCain(sénateur républicain de l’Arizona) qui est venu voter à deux reprises contre son parti, alors qu’il était en phase terminale en raison d’une tumeur au cerveau. Il a sauvé l’héritage de Obama et pour cela, il faudra lui ériger une statue de bronze au capitole. 

7. Sauver la planète: Une pause pour l’humanité, qui sèmera la mort et la désolation sur son passage, mais qui aura peut-être comme impact une prise de conscience sur l’importance de faire attention à notre planète;(c’est mon côté Calinours!!!)

8. Plusieurs entreprises ne s’en sortiront pas: Avec le tiers de l’humanité en confinement, l’économie internationale sera bouleversée. Comment s’en sortir lorsque l’économie est en pause ? Il ne faut pas oublier que la plupart des charges financières des entreprises vont rester.(Loyer, hypothèque, électricité, communications, ETC.) Il y aura une véritable purge économique et pour essayer de l’empêcher, les gouvernements vont devoir creuser leur déficit comme jamais dans l’histoire de l’humanité.

9. L’importance de la forme physique: Avec l’obligation de restreindre nos déplacements, les gens ont découvert la marche. Peut-être que cet événement sera un déclencheur incitant les gens à faire davantage d’activité physique.

Il s’agit bien évidemment de conclusions hâtives sur le sujet. Les leçons à tirer seront bien plus nombreuses. Pour l’heure, nous ne sommes pas sortis de l’auberge et les enseignements seront primordiaux pour affronter le prochain défi mondial. C’est une histoire à suivre…

Le bilan de l’année 2019

Par Michel Bouchard

  1. Donald Trump et les États-Unis
    1. Le shutdown: Le début de l’année a commencé sur des chapeaux de roues pour les Américains, car le gouvernement a été paralysé près d’un mois. Une paralysie survient lorsque les élus démocrates et républicains ne sont pas capables de s’entendre sur le budget de fonctionnement du gouvernement. Ces mésententes sont généralement causées par des luttes idéologiques. Dans ce cas, c’est la volonté de l’Administration Trump de financer, à la hauteur de cinq milliards de dollars,  la construction ou plutôt la finition du mur entre les États-Unis et le Mexique. Évidemment, les démocrates y étaient opposés et les employés du gouvernement ont été poussés au chômage. Finalement, l’Administration Trump a trouvé une manière de financer son projet, en décrétant l’état d’urgence nationale. Dans ce contexte, il n’a pas à demander l’approbation du Congrès et peut s’abreuver dans les budgets colossaux du Pentagone;
    2. Le rapport Mueller: Cette affaire qui traîne dans l’actualité depuis l’élection de Donald Trump en 2016, avait pour objectif d’enquêter sur la possible ingérence de la Russie dans l’élection. Les conclusions de Mueller sont les suivantes: La Russie a bel et bien manœuvré pour favoriser l’élection de Trump, mais il n’a pas été possible de relier le Président lui-même à l’affaire, malgré des apparences de collaboration. Ce document ne permettait donc pas aux démocrates d’ouvrir une procédure de destitution, mais ce n’était que partie remise…
    3. La destitution et l’affaire ukrainienne: Les démocrates déçus par les conclusions du rapport Mueller ont rapidement pu sauter sur un autre os. En effet, c’est un lanceur d’alerte, oeuvrant au sein de la communauté du renseignement américain, qui s’est inquiété du contenu d’une conversation téléphonique entre le Président américain et le Président ukrainien Zelensky. Dans cet échange téléphonique du 25 juillet, Trump a essayé d’influencer Zélensky pour qu’il ouvre une enquête sur les activités du fils de Joe Biden en Ukraine, en évoquant la possibilité de geler le soutien militaire américain à l’Ukraine. À partir de là, les démocrates ont ouvert une procédure de destitution le 9 septembre, pour tentative de corruption d’un dirigeant étranger. À moins d’un an de la prochaine présidentielle, il serait étonnant de voir la procédure de destitution aboutir. Toutefois, ça pourrait être l’élément pour pousser Donald Trump à ne pas se représenter pour l’élection de 2020;
    4. histoires de fusillades (Ohio, Texas…): 9 morts et 27 blessés en Ohio et 20 morts et 26 blessés au Texas…Ces deux fusillades du mois d’août ont été les plus marquantes de l’année, celles qui ont remis le contrôle des armes à feu à l’avant-scène, mais…Rappelons des faits: en 2017, les armes à feu ont fait 40 000 morts aux États-Unis. Si tout le monde possédait une arme, il est évident que nous serions tous plus en sécurité…
    5. Retrait américain en Syrie et bombardements turcs: Décision surprenante des Américains, lorsqu’ils ont annoncé leur retrait du nord de la Syrie. Dès lors, le gouvernement turc a répliqué en bombardant des positions kurdes du nord de la Syrie. À titre indicatif, les rebelles kurdes sont ceux sur lesquels la coalition internationale s’est appuyée pour combattre l’EI. Maintenant que ce groupe terroriste a été chassé de la Syrie, nous laissons à eux-mêmes ce groupe maltraité par l’histoire. Une minorité ethnique malmenée en Syrie, en Arménie, en Irak, en Iran et surtout en Turquie. Ils sont particulièrement ciblés par le régime de Recep Erdogan, en raison des activités du PKK(Parti des travailleurs du Kurdistan) qui est un parti indépendantiste kurde en Turquie et qui est considéré comme terroriste par le gouvernement turc.

(Ci-dessous une carte du Kurdistan)http://www.axl.cefan.ulaval.ca/asie/kurdistan_carte.htm

  1. L’affaire Huawei: C’est l’histoire de Weng Manzhou, dirigeante du géant chinois des télécommunications, qui a été arrêtée au Canada à la demande des autorités américaines. Ceux-ci la soupçonnent d’avoir violé les sanctions commerciales imposées à l’Iran. Depuis son arrestation, les relations sino-canadiennes se sont détériorées et ont mené à l’arrestation de trois citoyens canadiens en Chine et à des manoeuvres de rétorsions économiques dans les industries porcine et avicole.
  2. Crises politiques: 
    1. Venezuela: C’est au mois d’avril qu’une lutte pour le pouvoir s’est engagée dans ce pays pétrolier de l’Amérique du Sud frappé par une problématique d’hyperinflation. Le Président Maduro réélu en 2018 dans un contexte de manipulations et d’irrégularités électives a été mis en péril par l’autoproclamation du leader de l’opposition Juan Guaido. La crise a pris de l’ampleur lorsque près de 50 pays, dont les États-Unis, ont reconnu le nouveau président. Toutefois, l’armée n’a pas lâché l’héritier autoproclamé de Chavez, Nicolas Maduro.   
    2. Chili: Selon plusieurs observateurs, ce pays est l’un des plus stables et développés de l’Amérique du Sud. Toutefois, une série de décisions gouvernementales, comme l’augmentation substantielle du ticket de métro et la réaction musclée du gouvernement à des manifestations ont mis le feu aux poudres. Ces éléments sont évocateurs de deux traumatismes: un pouvoir d’achat anémique pour une très grande proportion de la population, gracieuseté des politiques mises en place par les «Chicago Boys»  et les souvenirs douloureux de la dictature de Pinochet. Tout ceci a poussé le gouvernement de Sebastien Pinera à annuler la COP 25. 
    3. Hong Kong: La révolte gronde dans ce territoire semi-autonome de la Chine, depuis que le gouvernement hongkongais a décidé de mettre sur la table un projet d’extradition de fugitifs chinois. Ce projet de loi a été vu par les leaders de la société civile de Hong Kong, comme une atteinte à leur démocratie. Au moment d’écrire ces lignes, des étudiants  sont engagés dans une lutte à finir avec les autorités chinoises, malgré l’abandon de la réforme citée plus haut. Plusieurs y voient une tentative chinoise pour briser la démocratie de ce territoire qui a été remis par la Grande-Bretagne à la Chine en 1997.
    4. Bolivie: C’est dans un contexte politique particulièrement tendu, où l’armée a lâché le Président Évo Morales, que celui-ci a dû démissionner et demander l’asile politique au Mexique. Il dirigeait le pays depuis 2006 et était contesté depuis qu’il avait perdu un référendum sur la possibilité de représenter pour un troisième mandat. C’est la Cour Suprême du pays, dans une décision litigieuse, qui avait permis à ce premier dirigeant indigène d’y aller pour ce nouveau mandat. Dès lors, sous les pressions de Washington et de la droite, la situation s’est envenimée pour provoquer ce que plusieurs appellent: « un coup d’État»;
    5. Liban: Après avoir échappé au Printemps arabe de 2011, les gens sont descendus dans les rues suite à l’annonce d’une nouvelle taxe sur l’application What’s app. Cette contestation a conduit à la démission du président Saïd Hariri. Qu’est-ce qui explique tout ça? Inflation galopante; corruption endémique du pouvoir; chômage élevé(20%); endettement du pays(156% du PIB et troisième au monde); disparition de la classe moyenne. Ce mouvement inédit, car interreligieux, a poussé la population à demander des réformes à leurs dirigeants religieux au pouvoir. Même le Hezbollah chiite, qui avait toujours conservé son aura, peine à convaincre le peuple de sa virginité. (Informations tirées de l’article de Marie-Ève Bédard de Radio-Canada: https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/1408601/gros-plan-crise-politique-liban
    6. Haïti: Une énième crise politique dans ce pays des Caraïbes. C’est l’affaire PetroCaribe qui est l’événement déclencheur de cette crise. PetroCaribe, c’est une alliance entre le Venezuela et les pays des Caraïbes pour la fourniture de pétrole à un taux préférentiel. Selon les plaignants, il y aurait eu une dilapidation de fonds publics à la hauteur de 3,8 milliards de dollars américains. Le Président de la République d’Haïti, Jovenel Moïse, peine à ramener le calme, car son gouvernement est accusé de corruption et que la confiance des habitants à son égard est très faible, car lors de son élection en 2017, seulement 21% des électeurs s’étaient déplacés;
  3. La saga du Brexit: Une année remplie d’émotions en Grande-Bretagne. Après de multiples tentatives pour conclure le Brexit, Theresa May a été contrainte de démissionner de son poste pour laisser sa place au  Trump britannique, Boris Johnson. Celui-ci, adepte d’un Brexit dur*, n’a pas pu réaliser son objectif. Dans ce contexte, il a décidé de jouer son va-tout en demandant la dissolution de la Chambre pour la tenue d’élections qu’il a remportées avec une majorité écrasante. Près de deux ans et demi après le référendum gagnant sur le Brexit, le doute subsiste toujours, mais la victoire des conservateurs va permettre à Johnson de réaliser sa promesse de campagne: une sortie de l’Union européenne le 31 janvier 2020.
  4. Les attentats de l’année:
    1. Christchurch en Nouvelle-Zélande: Une attaque terroriste perpétrée dans deux mosquées a fait 50 morts et 50 blessés. Au-delà de cette tragédie humaine, c’est le mode opératoire de l’agresseur qui fait réfléchir, car ces fusillades ont été visionnées par des milliers d’internautes par l’entremise de l’application Facebook Live. Du voyeurisme dérangeant et une entreprise qui a perdu le contrôle de sa machine. Vous vous souvenez sûrement du Dr Frankenstein ?
    2. Massacres au Sri Lanka: Au mois d’avril, c’est le Sri Lanka qui a été frappé par une série d’attaques à la bombe en quelques heures. Les terroristes, n’ayant pas revendiqué les attentats, ont semé la terreur et la désolation en s’attaquant à des églises catholiques et à trois hôtels de luxe. Bilan: 290 morts et plus de 500 blessés.
  5. Mort du chef du groupe armé État islamique Abou Bakr Al-Baghdadi: Le calife autoproclamé du califat de l’E.I. en Syrie et en Irak a été tué par un raid américain dans le nord de la Syrie. Le calife est responsable de plusieurs dizaines d’attentats en Irak et en Syrie. Il était l’homme le plus recherché de la planète et il s’agit du trophée de chasse 2019 de l’Administration américaine. Le calife est mort: vive le calife! Son nom:  Abou Ibrahim al-Hachemi al-Qourachi; 
  6. L’incendie de Notre-Dame de Paris: C’est le 15 avril que va éclater un incendie qui va détruire la cathédrale de Notre-Dame de Paris. Le temple vieux de sept siècles est le monument le plus visité de France avec ses 13 millions de visiteurs. Sa destruction a provoqué des élans de générosité, afin de pouvoir rebâtir ce monument mythique. En effet plus de 1 milliard de dollars ont été ramassés et le défi des prochaines années sera de s’entendre sur la reconstruction.
  7. 75e anniversaire du débarquement de Normandie: Le 6 juin 1944, les alliés débarquèrent en Normandie pour dans ce qui a été l’événement marquant dans la fin de la Deuxième Guerre mondiale. Une opération de grande envergure qui va permettre aux forces alliées de reprendre pied sur la France et pouvoir avancer jusqu’à la chute de Berlin en avril 1945.
  8. Difficultés des médias écrits: Les médias écrits connaissent des difficultés sans précédent. Le coeur de la problématique se retrouve dans le financement de leurs activités. Avec l’avènement d’internet et le développement de géants du Web(GAFA) les utilisateurs se sont habitués à consommer de l’information gratuite.** Les gens ne s’abonnent plus aux journaux, car il faut payer et les annonceurs n’ont plus d’intérêts à s’afficher. Ils délaissent donc ces médias et consacrent leur budget de publicité à des endroits plus payants et plus ciblés. Dans ce contexte, il y a un manque de financement qui cause la perte des médias écrits et par la bande, met en danger la démocratie.
  9. L’Amazonie en feu: C’est une nouvelle qui fait la manchette chaque année. Des feux volontaires, pour accélérer le déboisement de la plus grande forêt du monde. À partir de là  naît une crise planétaire entre les défenseurs de l’environnement et les partisans du développement économique du Brésil. Plusieurs dirigeants internationaux se sont indignés de cet incendie majeur, mais le Président Bolsonaro les a invités à prendre leur « gaz égal»;
  10. La marche sur le climat et Gretha Tunberg: C’est l’histoire d’une jeune fille qui a lancé un mouvement mondial pour réunir la planète lors d’une marche historique pour le climat. Selon le Times, Gretha Tunberg est la personnalité de l’année 2019.
  11. Attaques sur l’oléoduc en Arabie-Saoudite: une attaque lancée par des drones sur des installations pétrolières de la compagnie saoudienne Aramco, est venue compromettre la capacité de production de pétrole de l’Arabie-Saoudite. C’est environ 5% de la capacité de production mondiale qui a été touchée. Immédiatement après les attaques, les rebelles houthis du Yémen ont revendiqué le tout. Comme ceux-ci sont d’allégeance pro-iranienne, il n’en fallait pas plus pour que les Américains accusent l’Iran. Nous étions donc engagés dans une guerre de rhétorique entre le bloc saoudien et le bloc iranien.
  12. Condamnations en Catalogne et manifestations: Au mois d’octobre dernier, 12 leaders catalans ont été reconnus coupables de sédition et condamnés à purger entre 9 et 13 ans de prison. Rappelons les faits: ces condamnés ont organisé un référendum sur l’indépendance de la Catalogne. Il s’agissait d’un exercice démocratique qui s’est déroulé dans un pays que l’on dit démocratique, l’Espagne.   Il n’en fallait pas plus pour déclencher des manifestations monstres en Catalogne. 
  13. COP 25: La conférence présidée par le Chili, mais tenue à Madrid pour des raisons politiques, s’est soldé par un échec monumental. Dans un contexte où il y a urgence d’agir et que l’accord de Paris est voué à l’échec, dû au retrait des Américains, il faut se demander s’il y a vraiment une volonté politique pour lutter contre ce fléau climatique qui nous guette.

* Sortie de l’Union européenne, sans avoir une entente négociée entre les deux parties.

** Lorsque vous pensez que c’est gratuit, c’est que vous êtes le produit.

 

Être ou ne pas être climatosceptique

Par Michel Bouchard

Depuis le début de ce siècle, un débat fait rage sur la responsabilité du réchauffement climatique.  D’un côté, il y a ceux qui pensent que l’activité de l’être humain est responsable de ce réchauffement et de l’autre, il y a les partisans de l’idée selon laquelle ce réchauffement est naturel. Qui dit vrai? Bien honnêtement, je n’en ai aucune idée, car je ne suis pas un spécialiste de la question. C’est pour cette raison que les scientifiques existent et que les médias répandent la bonne nouvelle. Ce que je veux expliquer aujourd’hui, c’est de comprendre les origines de ces deux conceptions du réchauffement climatique. Regarder les sources par lesquelles les gens se disent climatosceptiques ou non.

L’activité de l’être humain est responsable du réchauffement

C’est en 1958 qu’un premier scientifique(Charles Keeling) va démontrer la corrélation entre l’augmentation rapide de la concentration de gaz carbonique et l’activité humaine. À partir de là, une lente prise de conscience va s’amorcer sur la problématique. Un cheminement qui va mener à la création du GIEC* en 1988. Ce groupe d’experts va rédiger cinq rapports d’analyse sur la situation climatique. Les conclusions de ces rapports étaient sans équivoque: si rien n’était fait pour freiner l’augmentation de la température, l’humanité courrait à sa perte. C’est dans cette optique que les dirigeants de pays se sont engagés dans des discussions qui ont mené à la signature du protocole de Kyoto en 1997 et à l’entente de Paris en 2015. Donc, lorsque vous avouez être inquiets pour l’avenir de notre planète, vous devez nécessairement asseoir votre argumentaire sur les travaux du GIEC.

Cela dit, lorsqu’un militant descend dans la rue comme la semaine dernière(manifestation du 27 septembre 2019), il est important d’ajuster son argumentaire sur les bonnes sources et surtout: d’accompagner cette action ponctuelle, de gestes concrets au quotidien.

C’est un phénomène naturel

Lorsque l’on se dit climatosceptique, il faut aller puiser nos sources à travers les méandres du web. Ces temps-ci, un physicien français, François Gervais, fait beaucoup de bruit. Il faut dire qu’il vient d’écrire un livre qui s’intitule: « Le réchauffement climatique est un leurre.» Bien honnêtement, je ne connais pas ce monsieur et je vous laisse juger de la pertinence d’appuyer ses dires par son propos. Selon le climatologue François-Marie Bréon qui se prononçait sur un livre de Gervais écrit en 2013: « L’ouvrage de François Gervais témoigne d’une profonde ignorance des sciences du climat. La plupart des arguments avancés par l’auteur sont en totale contradiction avec la littérature scientifique.** Toutefois, vous pouvez continuer vos recherches et vous arriverez probablement à vous convaincre du leurre du réchauffement. Avec la magie du web, il est possible de trouver des preuves accablantes pour vérifier n’importe laquelle théorie du complot. (voir 9/11) Des théories fumeuses, qui sèment un doute*** dans l’esprit des gens et qui anesthésient notre action collective. Tant que subsiste une possibilité que le pire n’arrive pas, la complaisance et l’immobilisme sont au coeur de notre action.(ou inaction c’est selon…)

En conclusion

L’objectif de cet article était d’essayer de vous montrer de quoi est fait l’argumentaire de chacune des parties dans l’affrontement idéologique sur le réchauffement climatique qui engendre des changements climatiques. Les citoyens prennent ce qui est disponible autour d’eux et se forgent une opinion. Dans ce contexte, je vous laisse juger de la pertinence du cadre de référence de chacun des points de vue. D’un côté, vous avez la science et le GIEC. De l’autre,  la « science », le supposé complot mené  par le GIEC et le doute.

Finalement, ce sera sur nos actions que l’histoire portera un jugement.  Si vous êtes «climatoinquiet», les beaux discours, la signature de pétitions, la participation à des  manifestations ne suffiront plus. Il faudra prendre des actions individuelles immédiates pour changer la donne. Pour les climatosceptiques, j’aurais envie de leur poser une question: « Est que notre manière de vivre aura des impacts négatifs sur l’environnement dans lequel les générations futures vivront ?» À vous de répondre…  

* Groupe intergouvernemental sur l’évolution du climat. Il est composé d’un groupe d’experts (36 membres actuellement) qui passe en revue toute la littérature scientifique en lien avec le climat. À partir de là, le groupe rédige un rapport pour faire état de la situation.

**https://www.lemonde.fr/sciences/article/2013/10/28/les-contre-verites-du-dernier-pamphlet-climatosceptique_3504317_1650684.html

*** L’institut Georges C.Marshall a fait de la semence du doute son fonds de commerce. Ces premiers clients provenaient de l’industrie du tabac.  À cet égard, j’ai déjà publié un résumé de lecture sur le livre: « Les semeurs de doute ».

La poudrière du Moyen-Orient

Par Michel Bouchard

La  fin de semaine dernière, une attaque lancée par des drones sur des installations pétrolières de la compagnie saoudienne Aramco, est venue compromettre la capacité de production de pétrole de l’Arabie-Saoudite. C’est environ 5% de la capacité de production mondiale qui est touchée. Immédiatement après les attaques, les rebelles houthis du Yémen ont revendiqué le tout. Comme ceux-ci sont d’allégeance pro-iranienne, il n’en fallait pas plus pour que les Américains accusent l’Iran. Nous voici donc engagé dans une guerre de rhétorique entre le bloc saoudien et le bloc iranien. Dans ce contexte, je vais répondre à quatre questions:

  1. Il se produit environ 100 millions de barils de pétrole dans le monde. La production de l’Arabie-Saoudite représente 10 % de la capacité mondiale. Si l’on considère que les attaques ont endommagé à 50 % de la capacité de production de l’Arabie-Saoudite, il y a un manque à gagner de 5% à l’échelle mondiale.
https://www.boursorama.com/actualite-economique/actualites/les-producteurs-de-petrole-dans-le-monde-en-fevrier-2018-eee1d385c769cc829dca2bd23813e366
  1. Quelles sont les alliances impliquées ? 
    • D’un côté, il y a l’Arabie-Saoudite qui est soutenu par les États-Unis. Une alliance traditionnelle entre un important exportateur(L’Arabie-Saoudite)  de pétrole et un important importateur. (États-Unis) Pour l’instant, les Américains, malgré leur importante production, sont encore dépendants de l’approvisionnement saoudien. D’ici 2025, la situation devrait changer avec l’atteinte prévu l’auto-suffisance énergétique des Américains.
    • De l’autre, vous avez les Iraniens qui sont impliqués dans un conflit indirect au Yémen* contre l’Arabie-Saoudite et qui est appuyé par ses alliées naturels que sont la Russie et la Chine.
  1. Quelle est l’importance géostratégique de cette région ?
    • Située entre la péninsule arabique et l’Iran, il y a le golfe Persique. Dans cette région circule une grande partie de la production pétrolière mondiale. Il faut s’attarder particulièrement au détroit d’Ormuz. Il s’agit d’un passage situé entre l’Iran et le Royaume d’Oman, qui est d’une largeur minimum de 33 Km en eau peu profonde et qui exige une circulation maritime à sens unique sur le territoire iranien. Pour bien saisir l’importance de ce détroit pour le trafic pétrolier, voici quelques chiffres: 
      1. 21 millions de barils de pétrole y circulent à chaque jour;
      2. C’est 20% de la consommation mondiale;
      3. 20 pétroliers passent quotidiennement à travers le détroit;
      4. 6 pays y font passer leur production pétrolière;(Arabie-Saoudite,Qatar, Iran, Irak, Émirats-Arabes unis et Koweit)
      5. En raison de l’instabilité, il en coûte 500 000$ par passage;(50 000$ au début de l’année 2019)
  1. Doit-on s’inquiéter de la situation ?
    • Oui. Ces événements impliquent les grands acteurs de la géopolitique mondiale. Un seul faux pas et nous pourrions nous retrouver dans un marasme qui pourrait compromettre 20% de la production mondiale de pétrole. Pour l’instant, on ne peut pas dire que nous sommes dans une situation d’indépendance énergétique.
    • Non. Derrière cette rhétorique guerrière, il a fort à parier qu’il ne se passera rien. Les intérêts en jeu sont trop importants, pour que les dirigeants impliqués se laissent emporter dans une spirale de violence. L’Arabie-Saoudite et l’Iran sont dans le même bâteau: ils dépendent de l’exportation pétrolière pour assurer la pérennité de leur régime respectif. 

*Il s’agit d’une catastrophe humanitaire méconnue du grand public. Ce sujet devra faire l’objet d’un texte de ma part à un moment donné.

L’hégémonie mondiale

Les derniers mois de la présidence de Trump sont secoués par des dissensions qui fusent de toutes parts. Plusieurs livres ont été écrits(1) et sont venus assombrir davantage la façon de gérer de Donald Trump. Ce Président, qui avait choisi le slogan de campagne:« Make America great again » est probablement en train de rater sa cible. L’étoile américaine est en train de pâlir à l’internationale, en raison de cette volonté de travailler en vase clos. Cette perte de vitesse profite à l’autre géant de l’économie mondiale: la Chine de Xi Jinping.  Dans ce contexte, qui va dicter l’agenda du monde dans les prochaines années?

 

L’unilatéralisme de Trump

Il va s’en dire que la stratégie du Président de redonner sa grandeur l’Amérique est en train de se retourner contre lui en raison du caractère unilatéral de sa politique. Un unilatéralisme visible à travers plusieurs manœuvres comme: le retrait de l’entente de Paris, la guerre tarifaire avec la Chine, le sabotage de l’entente sur le nucléaire iranien et la reconnaissance de Jérusalem comme étant la capitale d’Israël. Des actions qui sont venues fragilisées ses relations, autant avec ses ennemis que ses alliés, altérant le leadership mondial des États-Unis. Une hégémonie construite tout au cours du 20e siècle, à travers deux conflits mondiaux et la chute du géant soviétique.

 

L’Empire chinois

Pendant ce temps, le gouvernement chinois est en train de tisser une toile économique très impressionnante à travers son ambitieux projet de l’établissement d’une route de la soie.(2) Un projet colossal qui consiste à faire de la Chine la première puissance économique du monde en 2049.(3) Bien que empêtré  dans les troubles qui secouent son territoire semi-autonome de Hong Kong et une guerre tarifaire avec son homologue américain, Xi Jinping continue sa marche vers une domination économique et politique mondiale. Les nouvelles routes de la soie est un projet qui sera soutenu par un budget colossal. (entre 8000 et  40 000 milliards de dollars U.S. selon différentes sources) et qui vise ni plus ni moins que de mener tous les chemins vers la Chine. Ce projet surnommé « initiative ceinture et route » a pour objectif d’étendre l’influence chinoise, en Afrique, en Asie, en Europe et en Amérique latine en promettant de renforcer ses investissements dans les pays partenaires. Des investissements dans les infrastructures (routes, ponts, barrages hydroélectriques, ETC.) les réseaux de communications (5G), les ressources naturelles, et l’acquisition d’entreprises. Dans plusieurs pays, les besoins d’investissements sont criants et Pékin le sait trop bien. Ces actions sont critiquées par plusieurs, car elles placent des pays pauvres dans une situation de dépendance(encore) à l’égard de la Chine, mais ça, c’est une autre histoire…(4)

 

En conclusion

 

Il est difficile de prévoir le futur hégémonique, d’autant plus que l’on ne connait pas le prochain résident de la Maison Blanche. Dans l’hypothèse d’un retour de Donald, Trump, la place que vont occuper les États-Unis dans une dizaine d’années, ne peut que diminuer. Le «Make America great again» ne se concrétisera pas, car ses relations avec différents pôles de puissances de la planète se sont dégradées et il est difficile de voir une amélioration des relations au courant du prochain mandat. De l’autre côté, le président chinois est en selle pour un bout et son projet des nouvelles routes de la soie lui survivra, car il a été inscrit dans la constitution chinoise en 2017. Cette posture consacre, aux Chinois, un avantage certain sur l’avenir. 

 

Toutefois, il ne faut pas compter les Américains pour battus, car le pouvoir attractif de l’Amérique aura toujours un petit quelque chose…De plus, le contexte des jeux de pouvoir de la planète semble militer vers un monde multipolaire. L’expérience de la Guerre froide a laissé un goût amer et les autres acteurs ne redeviendront sûrement pas des vassaux de deux grands.

1- À cet égard, il faut particulièrement considérer les livres de Michael Wolf:« Fire and fury» et celui de Bob Woodward :« Fear: Trump in the White House ».
2-Route  mythique qui était la voie de prédilection des caravanes de marchands d’épices, de pierres précieuses et de tissus de toutes sortes, la route de la soie a contribué à la richesse et à la puissance de la Chine il y a plus de 2000 ans.
https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/780010/route-soie-chine-xi-jinping-projet-economie
3-Cette date symbolique, qui marque le 100e anniversaire de la proclamation de la République populaire de Chine par Mao Zedong.
4- À cet égard, le cas du Monténégro est très intéressant. Une autoroute(20 millions de dollars du kilomètre) construite par des entreprises chinoises avec un prêt auprès de banques chinoises. À ce prix, il est clair que le pays ne pourra jamais rembourser son créancier…

Encore deux tueries de masse aux États-Unis. Dans ce contexte, je propose d’un lire article que j’ai écrit le 25 février 2018. Il est encore très actuel. De plus, je vous invite à consulter le site suivant:

https://www.gunviolencearchive.org/reports/mass-shooting

Les derniers événements de Parkland en Floride, m’amène à discuter de la question des armes aux États-Unis. La dernière fois que l’attention du public avait été focalisée sur cette cet enjeu, fut lors de la fusillade de Las Vegas à l’automne dernier. Comme je le mentionne souvent à mes élèves, ce sujet est fort intéressant, car il me permet d’en parler dans mes cours à chaque année. Il y aura toujours une fusillade pour justifier notre attention pour quelques jours.

Le deuxième amendement de la constitution américaine

Pour débuter notre réflexion, il est primordial de comprendre que la possession des armes est inscrite dans l’ADN de la culture américaine, parce que inscrite dans la constitution. Ce deuxième amendement stipule que : «tout citoyen américain a le droit de porter des armes.»(Wikipedia «deuxième amendement de la constitution américaine» Ce droit fait donc parti de l’ADN des Américains et ils y sont très attachés. C’est d’ailleurs le mandat que s’est donné le puissant lobby des armes (NRA): celui de chien de garde du deuxième amendement. Pour y arriver, il possède des moyens considérables pour influencer les décisions à Washington.

Le débat est relancé

Donc, suite à cette nouvelle tuerie, le débat fait rage au sujet du contrôle des armes. D’un côté, vous avez le parti républicain qui est infiltré depuis longtemps par la NRA. Leur position consiste à dénoncer ces violences et d’en appeler à des législations pour contraindre la vente d’armes à des gens ayant des antécédents psychiatriques, mais en faisant attention de ne jamais altérer les libertés individuelles. De l’autre côté, les démocrates dénoncent depuis longtemps la vente d’armes d’assaut comme le modèle AR 15, qui a été utilisé dans la fusillade de la semaine dernière. Rappelons que c’est ce type d’arme avait été utilisé lors du massacre dans une école de Sandy Hook en 2012. Ce carnage avait été perpétré par un jeune de 15 ans et avait fauché la vie de six enseignants et de vingt enfants d’une classe de première année. Le débat qu’avait provoqué cette tuerie avait été épique, mais les résultats désolants. Tout ceci dans un contexte où le Sénat était contrôlé par les démocrates de Obama.

Les cartes de l’influence

Dans ce contexte, Donald Trump est sous pression, car les voix s’élèvent pour une législation pour encadrer les ventes d’armes aux États-Unis. Le Président vient d’ailleurs de charger des fonctionnaires d’étudier les alternatives pour interdire la vente de «Bump Stock». Ce dispositif vendu pour augmenter la cadence des tirs d’une arme semi-automatique comme l’AR 15. Partisan de la NRA, ne vous inquiétez pas, car votre lobby a tous les outils pour faire reculer les politiciens sur cette question. L’argent continuera de couler à flot, pour convaincre les républicains plus sensibles à protéger à tout prix le deuxième amendement. Pour les incorruptibles, il faut toujours se méfier de nos squelettes que l’on pourrait avoir dans un placard.

En conclusion, il y eut une tuerie, il y a de la tristesse et il y aura de profondes déceptions… Les armes font partie de la culture américaine et les politiciens n’ont pas le gros bout du bâton dans ce dossier. La NRA a réussi à bloquer toutes les tentatives de Barack Obama pour légiférer sur les armes. Excusez mon manque de positivisme, mais je vous rappelle que ce sont les Républicains qui sont à la Maison Blanche.* Comme l’évoque assez souvent les partisans du lobby pro armes, vous savez ce que ça prend pour arrêter un méchant avec une arme ? Eh oui, un gentil avec une arme! À la blague, je dis souvent aux élèves sur cette question:« Tout le monde le sait, que si tout le monde avait un fusil dans la classe, nous serions tous plus en sécurité…»
*(http://www.tvanouvelles.ca/2017/04/28/trump-a-la-nra-vous-avez-un-ami-a-la-maison-blanche