Le choléra d’Irlande

Par Jean-Bernard Carrier

 

 

Saviez-vous que… Grosse-Île

De 1832 à 1937 la Grosse-Île, située dans le fleuve Saint-Laurent, face à Montmagny (environ 40 km en aval de Québec) servait de station de quarantaine pour éviter que des épidémies de choléra et d’autres maladies infectieuses se déclarent au pays. En effet, tous les immigrants (qui arrivaient principalement par bateau sur le fleuve) devaient y faire une quarantaine avant de pouvoir mettre le pied en ville! C’est pourquoi on la surnomme aussi l’Île-de-la-Quarantaine.

« Malgré ces efforts, une épidémie de choléra se propage en 1833-1834 à Québec et à Montréal, faisant respectivement 3 800 et 1 900 victimes. »1 Le choléra cause des « diarrhées brutales et abondantes »2 entraînant la déshydratation et même la mort d’environ la moitié des personnes atteintes.

En 1847, une grande famine sévit en Irlande. Des milliers d’Irlandais fuyant la faim émigrent vers le Canada. Après 6 à 9 semaines de traversée de l’Atlantique 441 navires arrivent à destination du port de Québec. S’ils ne sont pas déjà morts en mer (5000), les 90 150 migrants arrivent à Grosse-Île épuisés, mal nourris et malades. Une épidémie de typhus se déclare sur l’île. Le typhus cause une grave fièvre. Cette maladie est due à des bactéries transmises par les puces transportées à bord des navires par les rats.3 On dénombre plus de 5000 morts sur l’île dont du personnel médical. L’épidémie atteindra des villes accueillant les Irlandais comme Montréal et Kingston. Au total, on estime que l’épidémie de 1847 aura fait 20 000 morts.

Je vous recommande grandement d’aller visiter le Lieu historique national de la Grosse-Île-et-le-Mémorial-des-Irlandais l’été prochain. Il faut prendre un petit bateau à partir du port de Québec ou à Berthier-sur-Mer opéré par les croisières Lachance.4 Bonne fin de semaine!

Sources :

  1. L’Encyclopédie Canadienne, Lieu historique national de la Grosse-Île-et-le-Mémorial-des-Irlandais, consulté le 25 mars 2020, https://www.thecanadianencyclopedia.ca/fr/article/grosse-ile-la .
  1. Wikipédia, Choléra, consulté le 25 mars 2020, https://fr.wikipedia.org/wiki/Chol%C3%A9ra .
  1. Wikipédia, Typhus, consulté le 25 mars 2020, https://croisiereslachance.com/

https://fr.wikipedia.org/wiki/Typhus

  1. Croisières Lachance, Nos croisières, consulté le 25 mars 2020, https://croisiereslachance.com/

La grippe espagnole

Par Jean-Bernard Carrier

 

 

Saviez-vous que… Baie-Johan-Beetz

 

En 1918, la 1re Guerre mondiale était sur le point de se terminer, mais la “grippe espagnole” (souche A(H1N1) très virulente) se propageait partout dans le monde. On la surnomme espagnole car, l’Espagne ne participait pas à la “Grande Guerre”. C’est donc le seul pays qui avait publié des informations sur la pandémie… bien que la grippe serait originaire des États-Unis. La pandémie de 1918 a fait entre 20 et 50 millions de morts (2 à 5 % de la population du monde à cette époque).

Baie-Johan-Beetz, petit village de moins de 100 habitants de la Côte-Nord, est le seul endroit qui a été épargné. En effet, Johan Beetz, médecin et biologiste d’origine belge établit dans la petite communauté, avait mis le village en quarantaine pour ainsi sauver des vies! Fait intéressant, cet homme est aussi un des fondateurs du jardin zoologique de Québec (aujourd’hui fermé)!

Sources:

Wikipedia, Grippe espagnole, consulté le 20 mars 2020, https://fr.wikipedia.org/wiki/Grippe_espagnole .

Wikipedia, Baie-Johan-Beetz, consulté le 20 mars 2020, https://fr.wikipedia.org/wiki/Baie-Johan-Beetz .

Wikipedia, Johan Beetz, consulté le 20 mars 2020, https://fr.wikipedia.org/wiki/Johan_Beetz .

La Peste noire

Par Jean-Bernard Carrier

 

Lors de la seconde moitié du Moyen Âge (476 à 1492), donc à partir de l’an 1000, on assiste à un véritable essor urbain et commercial. En effet, les bourgs fortifiés et les villes européennes que l’on connaît aujourd’hui telles que Paris, Bruges ou Florence sont en pleine expansion, car le commerce est florissant. Des navires de marchandises parcourent la mer Méditerranée et la mer du Nord alors que les anciennes routes romaines sont utilisées par les commerçants pour voyager d’une ville européenne à une autre, d’un royaume à un autre et même jusqu’au Moyen-Orient! C’est le grand commerce!

Les villes, à cette époque, se développent très rapidement grâce à l’économie , mais leur développement n’est pas planifié… Les maisons étaient collées les unes sur les autres, il n’y avait pas d’infrastructures comme des égouts ou des aqueducs (ce qui existait quelques siècles plus tôt dans l’Empire romain). Vous pouvez vous imaginer que les rues ressemblaient rapidement à des égouts et des dépotoirs à ciel ouvert. L’eau potable des puits, des fontaines ou des cours d’eau était contaminée et des incendies ravagent régulièrement des bourgs entiers. Enfin, vu la promiscuité, au 14e siècle, des épidémies de choléra ou de fièvre frappèrent l’Europe à plusieurs reprises.

C’est toutefois la Peste noire (ou Grande Peste) qui fera le plus de ravages. La peste cause une forte fièvre, une dégradation de l’état général, parfois des problèmes pulmonaires, des maux de tête, l’apparition de bubons (enflure des ganglions) et la mort.(1.) En 1348, environ le tiers de la population d’Europe succombe à cette maladie (25 millions de morts). À cette époque, on ne sait pas encore que « la peste est causée par un bacille [bactérie] transmis par les puces. Les puces vivent sur les rats qui infestent les navires. »(2.) Vu le manque d’hygiène et le manque de distanciation sociale(concept récent dans l’histoire) sur les navires et dans les villes, les humains sont infectés par les puces. Le commerce maritime étant en pleine effervescence lors de cette période de l’histoire, la maladie se propage très rapidement à travers l’Europe en suivant les routes commerciales. 

Des gravures du Moyen Âge montrent des médecins qui, pour se protéger tout en soignant les malades de la peste, portaient une grande robe noire, des gants et un masque rappelant un bec d’oiseau rempli d’épices odorantes. Ils étaient surnommés « corbeaux » et touchaient les malades avec un bâton pour ne pas se contaminer. 

Sources: 

  1. Passeport santé, La peste, consulté le 30 mars 2020, https://www.passeportsante.net/fr/Maux/Problemes/Fiche.aspx?doc=peste
  2. Line Lamarre, dir., Réalités, histoire et éducation à la citoyennenté, Manuel de l’élève 1B, ERPI, St-Laurent, 2005, p. 313. 
  3. Wikipédia, Peste bubonique, consulté le 30 mars 2020, https://fr.wikipedia.org/wiki/Peste_bubonique

Tous égaux devant le coronavirus: pas vraiment! (Partie 1)

Par Michel Bouchard

«Ce qui est vieux meurt, ce qui est nouveau lutte pour naître, et dans l’interrègne, nombreux sont les symptômes morbides.»

Antonio Gramsci,

Quaderni del carcere, 1930.

 

Il y a de ça quelques années, j’ai terminé une maîtrise en enseignement de l’histoire à l’université de Sherbrooke. Hélas, seulement trois personnes ont lu mon essai: mon professeur, Tristan Landry, le correcteur et moi-même. La thèse que j’ai développée était tirée des différents ouvrages de Joseph Stiglitz qui a été  vice-président de la Banque mondiale, conseiller économique de Bill Clinton et récipiendaire du prix Nobel de l’économie en 2000. En substance, dans cet essai, j’ai développé la thèse suivante: les échecs de la mondialisation sont attribuables au modèle néolibéral issue du consensus de Washington. (Vous pouvez cliquer le lien précédent pour lire mon essai.(Bon courage)  Selon Stiglitz, il ne faut pas remettre en question la mondialisation, elle était inévitable.  C’est la façon dont elle a été conduite qui a fait défaut. Elle a été vectrice d’inégalités disgracieuses, tant à l’échelle nationale des pays développés, qu’à l’échelle internationale. La crise du coronavirus nous offre, encore une fois, un laboratoire à ciel ouvert pour observer ces inégalités. 

P.S. J’ai écrit un article sur le sujet en 2017. Les inégalités dans la répartition des richesses.

Dans les pays développés

Les réactions à cette crise sont nombreuses dans les pays développés. Ces pays ont déployé un arsenal impressionnant pour soutenir les citoyens, pour qu’ils puissent passer à travers ce péril insidieux. La crise nous permet d’observer de grandes inégalités dans notre société. Il y a les riches et il y a les pauvres. Ceux qui passeront à travers cette crise sans trop de problèmes et qui en profiteront pour faire des choses qu’ils n’avaient jamais le temps de faire. Ceux qui peineront pour joindre les deux bouts, parce que frappés par une perte de revenus importante. Cette catégorie de personnes sortira de cette crise traumatisée, car elle devra se serrer la ceinture pendant des semaines, voir des mois et sera dépendante de  l’aide des gouvernements.

Rester à la maison est un privilège. La distanciation sociale est un privilège (titre emprunté dans l’article suivant:)

Aux États-Unis, les Noirs et les plus pauvres touchés de plein fouet par l’épidémie. https://www.courrierinternational.com/article/inegalites-aux-etats-unis-les-noirs-et-les-plus-pauvres-touches-de-plein-fouet-par-lepidemie

À l’exception de quelques pays, dont la Suède, les dirigeants ont adopté une stratégie de confinement pour lutter contre la pandémie. Toutefois, ce concept fortement encouragé par nos gouvernements est un concept qui est beaucoup plus facile à appliquer dans les foyers nantis.  Il ne faut pas oublier que des millions d’enfants, dans les pays développés, dépendent de l’aide du gouvernement pour prendre au moins un bon(ou un seul) repas par jour et qu’ils prennent ce repas à l’école. Dans ce contexte, le confinement poussera bien des gens dans l’insécurité alimentaire. En fait: l’isolement, est une affaire beaucoup plus facile à faire pour les riches, car les familles à faible revenu, vivent dans des espaces restreints, doivent emprunter le transport en commun pour se déplacer et peinent à soutenir leurs enfants dans leurs travaux scolaires, sans oublier le fossé important entre les enfants qui fréquentent les institutions publiques et les institutions privées, notamment au Québec. Au sortir de cette crise, il ne faudra pas s’étonner de voir une augmentation du décrochage et des difficultés scolaires et donc de voir une augmentation des disparités économiques à moyen terme.

La pause économique

Devant la logique de cette pause économique, il y aura des drames humains, car  les dettes contractées devront être honorées. Plusieurs institutions financières ont commencé à proposer leur aide pour soulager les citoyens. Reports de paiements d’hypothèque et de carte de crédit. Au bout de la course, les intérêts vont continuer de courir et les institutions financières ne perdront pratiquement rien. Ce sont les citoyens qui en ressortiront plus endettés. Il ne faut pas oublier, que les six plus grandes institutions financières au Canada, ont générées pour 46,6 milliards$ de profits en 2019 et qu’elles ont reçu 114 milliards$, entre 2008 et 2010, du gouvernement canadien pour passer à travers la crise de 2008.(Aux États-Unis ce sont des montants titanesques)  Elles offrent donc aux citoyens, de la fausse aide. Il s’agit plutôt de quelque chose comme une manœuvre politique pour donner l’illusion à la société qu’elles font leur part. Il ne faut pas être dupe… Au final, la perte de revenus sera dévastatrice pour les petits budgets, car il n’y aura probablement pas beaucoup de reports pour le paiement du loyer. C’est ici que s’arrête la logique de la pause économique. Il y a un loyer qui est à échéance et une épicerie à faire et mon propriétaire à une hypothèque à payer et une épicerie à faire. Qui va l’emporter selon vous?

Ma peur avec cette crise, c’est l’exacerbation des inégalités qui sera elle créatrice d’instabilité dans plusieurs grandes démocraties.  Notre société s’en trouvera complètement transformée au niveau économique et social. En 2008, le modèle néolibéral avait été lourdement écorché, mais les  interventions gouvernementales sans précédent de 2020 marqueront probablement la fin de ce modèle économique, catalyseur d’inégalités.

P.S. Dans le prochain article, je parlerai des inégalités devant la pandémie, d’un point de vue global.